Le travail de Gianni Motti révèle les faces cachées du système politique et, plus globalement, de l’état du monde. L’artiste aime considérer « le dessous des cartes », l’au-delà des apparences et de la conscience, comme les phénomènes paranormaux et d’anticipation, les mouvements sectaires, les instincts primitifs et les théories du complot.
Les oeuvres de Gianni Motti ne sont ni des sculptures ni des installations, pas même des ready-made, peut-être des ready-made assistés, parfois des multiples, plus rarement des pièces uniques, mais surtout des témoignages – textes, photographies, films – d’actions. Des gestes qui sont à considérer « en l’état », « comme dans la vie », mais qui, si l’on y regarde à deux fois, détournent et interrogent leur fonction et leur signification première, qu’elles soient sociales, politiques ou symboliques. Gianni Motti aime démystifier les croyances, la morale et le consensus, en les réinvestissant d’un sens nouveau, d’une prise de position décalée et inattendue ou d’une dénonciation souvent ironique et critique.
Le mode de détournement pratiqué par Gianni Motti semble davantage s’assimiler à des tentatives de contournement, voire à des tours de passe-passe : mort le 29 juillet 1989, il organisait son propre enterrement à Vigo (Entierro n°1) et se donnait la liberté de ressusciter, d’être quelqu’un d’autre et de choisir son identité. Plus significatif encore, la gestion de sa rétrospective proposée en 2004 par le Migros Museum de Zurich (Plausible Deniability). L’espace était totalement dédoublé de cloisons en contreplaqué, reconstruisant un parcours labyrinthique vide qui dirigeait, implacablement, le spectateur vers l’arrière-cour du musée. Les œuvres absentes, le commentaire les remplaçait, assumé par plusieurs guides chargés de présenter les étapes importantes du travail de Gianni Motti. Ce dernier substituait ainsi la narration à la réalité ; une manière d’organiser et de contrôler lui-même son passage à la postérité, de proposer un récit, de construire une légende et de donner définitivement à sa pratique artistique le statut de fiction.
Pour le projet Videos : new and revisited, et cette première série de projections, la vidéo de Gianni Motti, Cosmic Storm, Cern, qui a été réalisée au Cern grâce à la technique de l’infra-rouge. Elle relate l’expérience que Gianni Motti a pu vivre grâce à un groupe de scientifiques, qui ont découvert l’existence des neutrinos, particules invisibles et évanescentes, issues de la réaction nucléaire du cœur du soleil. Enfermé dans une sorte de boîte, Motti est percuté en permanence par ces neutrinos dont nous visualisons les trajectoires grâce à un système de détecteurs. Ces particules inframinces percutent en continu tous les corps, humain ou non, et sont constamment présentes dans notre environnement, sans que nous ne puissions jamais les voir ni les percevoir. Elles peuvent parcourir des kilomètres pour aller percuter des montagnes ou s’échouer au fond des océans.
Cette vidéo est une édition produite par le CEC pour l’exposition personnelle de Gianni Motti, Perpetual Channel, qui a eu lieu en novembre 2006, et qui témoignait de son immersion pendant plusieurs jours dans le monde très fermé du Cern et de ses chercheurs.
Gianni Motti (1958, Sondrio) vit et travaille à Genève. Son travail a été présenté dans le cadre de diverses expositions individuelles, comme : EX–POSITION21, Galerie Mezzanin, Geneva (2021) ; Ex-position au Helmhaus, Zurich (2018). Il a également participé à de nombreuses expositions collectives : Vertrauen à Helmhaus Zurich, Zurich (2022) ; Acquisitions 2021 au Fonds d’art contemporain de la Ville de genève, Genève (2022).
Ce projet bénéficie du soutien de l’Office fédérale de la culture et de la République et canton de Genève.